Les photos de Jean-Pierre AMET présentent les poupées réalisées par Fanette Istria. Une collection de vingt-trois costumes, ayant pour référence la thèse de Rennie Pecqueux-Barboni, soutenue en 1983 à l’université de Provence. Une étude si détaillée qu’elle à permis à madame Fanette Istria, à Fozzano, de créer ces reconstitutions exactes.
Avant que d’aborder le « COSTUME CORSE » en tant que tel, nous allons voir comment à une époque depuis très longtemps révolue, on obtenait la matière première pour l’élaboration de celui-ci.
Pendant des siècles, les femmes et les jeunes filles des villages , tissaient et filaient la laine, le poil de chèvre, le chanvre et le lin qui étaient destinés à leur usage vestimentaire. Il était courant , tandis qu’elle vaquait à ses occupations quotidiennes, de voir la gent féminine, une quenouille sous le bras.
L’usage était d’ailleurs d’offrir, à une jeune fille qui prenait époux, le jour de ses noce , une jolie quenouille ( a rocca) enrubannée et fleurie pour la circonstance, symbolisant les tâches que celle-ci devrait désormais accomplir dans sa nouvelle demeure.
Le filage et le tissage ( fait à la maison ) étaient des activités très prenantes . De ce tissage, tâche des plus ardues, on obtenait trois qualités textiles.
– La toile de Lin
– Le drap corse appelé communément « pannu corsu » ou « pannu frisu »
que l’on obtenait à partir de la laine de brebis
– Le drap de « Piloni » avec lequel on confectionnait la cape « pilone » des bergers et qui était, en poils de chèvre.
Le costume corse Masculin
En partant d’une base unique, chaque région pouvait apporter une particularité à ce costume et, c’est cela qui en faisait toute l’originalité. Cependant, ce dernier se composait , invariablement:
– d’une Chemise
– d’un Gilet
– d’une Veste
– de Culottes
– d’un couvre-chef
– et de guêtres
Prenons pour exemple ,
deux régions parmi tant d’autres :
Le Niolu et le Cap Corse
LA CHEMISE ( a Camisgia)
Elle était toujours ample, en lin fin tissé à la maison .
La Camisgia du « Niolin » était une chemise boutonnée au col et sur laquelle était passé un gilet de drap rouge,
Celle du « Cap Corsin » , par contre, se fermait au col, par une sorte de cravate nouée, que l’on appelait ( frisghjettu ) et se portait sous un gilet en soie rayée.
LES CULOTTES ( Braghe ) : Larges, à pont, elles étaient taillées dans le « Pannu Corsu » noir ou brun, s’arrêtaient à hauteur du genou où elles se boutonnaient , tandis que les jambes , elles, étaient protégées par des guêtres faites dans ce même drap. Ces guêtres, recouvrant la chaussure, montaient jusqu’aux genoux où, fermées par une douzaine de boutons elles venaient se fixer. Quand aux guêtres, portées par les bergers des montagnes, elles avaient cette particularité, que d’être confectionnées en peau de chèvre, le pelage, tourné vers l’extérieur.
LE COUVRE- CHEF : ( A barreta ) durant des siècles, pour se protéger des ardeurs du soleil , les hommes portèrent un bonnet pointu ( A barreta pinzutta) fait de drap ou de velours. , celui-ci céda le pas au bonnet phrygien en laine qui, à son tour ne tarda pas a disparaître au profit d’ un bonnet souple , de forme ronde qui porta alors, le nom de ( barreta misghia ). Ce n’est qu’aux alentours de 1875 , que « A barreta » emblématique, fut supplantée par la casquette. Cette dernière d’abord réservée aux jours de fêtes, entra peu à peu dans l’usage courant Pour parfaire ce traditionnel costume, il ne faut pas omettre de parler de la ceinture de cuir, élément très important, de celui-ci . Ceinture à travers de laquelle était passé le stylet et, attachée par devant, la giberne ( A Carchera ) dans laquelle étaient déposés, non seulement les munitions mais tout le matériel nécessaire pour réparer chaussures ou vêtements, en cours de voyages, si cela était indispensable. Dans son étude sur une famille de Bastelica , en 1887 Maximilien BIGOT * dresse l’inventaire vestimentaire du père de famille, qui était propriétaire d’un troupeau:
2 Vestes de drap Corse – 2 Pantalons – 2 Gilets de drap noir – 2 « Baretta misgia » de drap brun – 3 Caleçons de toile – 12 chemises de toile de lin ( faites à la maison ) – 4 mouchoirs de poches- 2 paires de souliers – 4 paires de chaussettes -1 manteau ( pilone ).
Il est intéressant de préciser que dans cet inventaire, étaient compris, les vêtements de fêtes qui ne se distinguaient des vêtements de tous les jours, que par leur moindre degré d’usure.
Le costume Corse Féminin
Celui-ci se composait ainsi :
– d’une Chemise
– d’un Justaucorps
– d’une Robe
– de jupons
– de bas
– d’un petit bonnet
– d’un fichu Avec bien entendu, comme pour le costume masculin, beaucoup de variantes selon l’âge, le rang social, où la région, de la personne qui le portait.
LA CHEMISE ( A Camisgia) faite elle aussi de toile de lin fin tissé à la maison .
Celle des « Sartenaises » (SartInese) était toute bordée de dentelle au col et aux poignets , froncée à l’encolure et ornée d’un élégant plastron.
Dans la région du « Niolu », elle était brodée de couleurs vives, boutonnée jusqu’au menton et comportait une collerette plissée et tuyautée.
Dans le Cap Corse, ( Capi Corsu) la chemise possédait une collerette qui se rabattait sur un gilet jaune ou blanc de toile piquée.
LE JUSTAUCORPS ( Imbustu ) Le jupon était en soie et ses manches mi-longues, laissaient apercevoir celles de la chemise.
LA ROBE ( U Vestitu )
Dans le « Sartenais » la robe était largement décolletée, pour mettre en valeur l’élégante chemise , ( décrite ci-dessus ). De soie ou de velours, celle-ci, dont les manches étaient fendues du coude au poignet, était décorée en sa base, de motifs floraux. Sa couleur était généralement claire pour les jeunes femmes et plus sombre pour les femmes d’un certain âge.
Dans le « Niolu » elle était faite en « pannu » brun. Tout aussi décolletée que celle de la Sartenaise , elle ne comportait cependant pas de manche, afin que l ‘ on puisse voir le justaucorps en soie, dont les manches mi-longues laissaient entrevoir celles de la chemise.
Dans le « Cap Corse», était portée les jours de fêtes, une robe toute bordée de velours, dont le corsageégalement brodé, se laçait devant, sur une busquière en soie rouge. sous cette robe , se cachaient les 7 jupons, ( qui seront décrits ci-après ) et par dessus celle-ci, pour la protéger, le tablier ( u sculzale) , décoré de jolies dentelles.
LE JUPON : les jupons devrions nous dire, ( E Rote) car ceux-ci étaient comme nous l’avons vu, au nombre de 7 et chacun, de couleurs différentes. Ils se portaient, les jours de fêtes, superposés les uns sur les autres, afin de laisser entrevoir la bordure de chacun d’entre eux.
LES BAS : Ceux-ci pouvaient être , de coton bleu, de laine noire et pour la jeune fille , si cette dernière était aisée: rouge ou rayés.
LE BONNET ( Scuffiotu ) : Il était décliné sous des formes et des couleurs variées. Ce petit béguin, qui pouvait être fait de soie ou de velours coloré, était posé sur leurs longs cheveux , préalablement nattés et relevés derrières les oreilles, en macarons. Sur celui-ci, on épinglait ( U Mazzaru ) apparut au XVIIe siècle et qui était un joli carré fait d’ Indienne pour les jours de semaine et de soie ou de dentelle pour les jours de fêtes.
Celui-ci, se porter tout aussi bien flottant, noué sous le menton, que relevé, formant alors des ailettes. Cela en fonction des diverses ( pièvi ). (1)
Pour compléter ce costume, nous parlerons enfin de :
LA FALDETTA : vêtement que portaient surtout les femmes mariées. ( A faldetta ) était une jupe de couleur bleue nuit, courte par devant mais très longue par derrière, afin qu’elle puisse être relevée sur les épaules et enserrer la tête. Elle était principalement portée le Dimanche pour aller à l’église ou bien pour se rendre au cimetière, Car ce vêtement à l’époque, manquait le deuil .
Il faut savoir que jusqu’à la fin du XVIII e siècle le bleue était la couleur associée au deuil. Ce n’est qu’au XIX e siècle que la couleur noire le symbolisa .
De nos jours, nous retrouvons « A Faldetta », uniquement dans les processions traditionnelles.
Comme nous avons pu le voir, dans l’ étude faite par Maximilien BIGOT en 1887 * concernant l’inventaire du père de famille; Nous allons, toujours sur les renseignements laissés par celui-ci, découvrir l’inventaire du trousseau féminin.
La garde robe des jours de fêtes, se composait ainsi :
– 1 Robe noire en Indienne
– 1 Robe foncée
– 1 paire de bas bleus en coton
– 1 paire de bas en laine noire
– 4 mouchoirs d’ Indienne pour la tête
– 1 mouchoir en laine noire
– 1 mouchoir en Indienne foncée pour les épaules
– une paire de souliers
– 1 paire de gants et une épingle à tête d’ Or, pour retenir A faldetta.
Quant à celle des jours de semaine, elle était constituée de :
– 1 Robe d’ Indienne
– 1 Justaucorps de grosse toile
– 1 Jupon blanc en drap corse
– 4 jupons en Indienne (2)
– 3 mouchoirs
– 2 fichus de cou
– et pour l’hiver : 1 camisole de laine et 1 corset de velours ( giupone ).
Il est toutefois singulier de constater, ce qu’écrivit, en 1894 Julie FILIPPI :
« Jadis, au Niolo, les jeunes filles à partir de sept ou huit ans, jusqu’au jour de leur mariage étaient habillées en garçons. Ce costume les préservait des attaques des sorcières ( Streghe ) ainsi que des entreprises des jeunes gens.
* (1) unités religieuses et administratives de l’Ancien Régime
* (2) faits avec de vielles robes. Le tissus étant coûteux, on songeait à le réemployer utilement à d’autres fins, lorsque le vêtement initial était défraîchi.
Un grand merci à Dominique BONAVITA, qui à rédigé ce texte, que vous pouvez consulter sur son blog Costumes corses. Dominique BONAVITA est Ecrivain. Elle est l’auteur de deux ouvrages, « Antonio BONAVITA – Biographie » et « Les méandres du temps » vous trouverez sur la page Litterature
Vous pouvez également vous rendre sur son blog
et à Jean-Pierre AMET pour les images d’illustration
Jean-Pierre AMET
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