Le chant polyphonique Corse, est une expression unique dans le bassin Méditerranéen. Il puise ses sources dans la vie de tous les jours, dans les évènements religieux, familiaux et sociaux. Comme dans toutes société modernes, des transformations se sont produites, plongeant dans l’oubli certains chants qui accompagnaient ces gestes quotidiens. L’évolution des modes de vie, à fait disparaître ces berceuses que les mamans chantaient à leurs enfants, les  » Nanni « .

Le chant polyphonique corse

Les jeunes Corses, ont aujourd’hui oublié les  » Serinati « (sérénades) que leurs grands pères et arrières grands pères adressaient à leurs bien aimées. D’autres chants ne résonnent plus dans les montagnes et villages Corses, comme les  » Tribbiere « des moissonneurs, les  » Voceri  » , lamentations funèbres chantées par les femmes ( les pleureuses ), qui marquèrent les voyageurs romantiques du siècle passé.

Malgré tout, même si ces chants ont disparus, l’essentiel à survécu, et les Corses chantent encore. Les chants qui résonnent aujourd’hui, dépassent les frontières de l’île. Des chanteurs insulaires portent sur les scènes internationales, certaines des formes des plus archaïques de la polyphonie Corse. C’est en réinvestissant avec force ce mode d’expression, que les jeunes ont su redonner au chant, la place majeure qui a été la sienne dans la communauté villageoise, qui a nourri pendant des générations entières, sa sensibilité profonde et ses rêves secrets.

La « Paghjella « , chant polyphonique, allie harmonieusement trois registres de voix:  » A segunda « , qui attaque, donne le ton et porte la mélodie principale;  » U bassu « , qui la suit, l’accompagne et la soutient. Enfin  » A terza « , la plus haute placée qui enrichi et adorne le chant. Même si l’on trouve ailleurs des formes parentes, ce qui est significatif dans la  » Paghjella « Corse, outre ses particularités mélodiques, c’est sa formidable vitalité et son caractère profane.

C’est autour des années 70, après avoir survécue une longue période de désintérêt, que la «  Paghjella «   a été redécouverte par le groupe phare « Canta u populu Corsu » (Le peuple Corse chante). Ce patrimoine est réinvesti par les jeunes, les femmes elles-mêmes prêtent leur voix à une chant qui d’origine était exclusivement masculin. La  » Paghjella « est interprétée par des solistes accompagnés, comme Antoine Ciosi, Petru Guelfucci, ou bien Ghjuvan Paulu Poletti. D’autres formations plus étoffées, recueillent une forte notoriété comme le groupe I Muvrini, A Filetta, Voce di Corsica ( les voix de la Corses ), et bien d’autres encore.

Le Chjami è rispondi

Le Chjami e rispondi, est une autre forme de chant très original. Cette joute poétique improvisée, requiert des interprètes, une virtuosité exceptionnelle. Ces chants sont très appréciés du public.
En ce qui concerne les chants sacrés, tous les éléments de la vie étaient rythmés par le calendrier religieux, ce qui à permis de développer des expressions « des Versi« ( façon de chanter la mélodie), leur étant propres. On retrouve dans le répertoire des confréries de l’île, des cérémonies entières chantées. Le chant polyphonique sacré est organisé autour des trois voix de base et interprété par les hommes.

Le chant polyphonique Corse n’est pas comme beaucoup le pense, un chant folklorique. Il est un moyen d’expression vivant, un lien fort qui relie dans le temps, tous ses interprétes à une chaîne de mémoires. Vibrer à sa puissance d’évocation, à son émotion, c’est sentir battre le coeur immémorial de l’île de beauté.